Récit de voyage et photos de Désirée Maillard-Salins, conceptrice voyages chez Terra Argentina.

La province de Santa Cruz à l’extrême sud de la Patagonie, protégée de la pluie par les Andes, déroule ses vastes plaines arides et sèches, un désert froid battu par les vents.

Beaucoup de légendes ont été tissées autour de la Patagonie, les pionniers en quête d’espaces vierges et de nouvelles aventures sont partis vers cette terre qui met pourtant à rude épreuve les chances de survie de l’homme. Un siècle plus tard, voir des hommes à cheval encadrant les troupeaux fait toujours pleinement partie du paysage rural argentin. Visiter les estancias de la Patagonie nous révèle donc un peu de l’histoire de cette terre australe.

En route vers ces estancias qui partagent leur histoire.

Avec mes compagnons de voyage, nous quittons El Calafate sur une route de piste pour rejoindre l’Estancia Nibepo Aike en plein cœur du fameux parc national Los Glaciares.

Le croate Santiago Peso arrive en Argentine au début du 20ème siècle et s’installe sur ces terres au sud du Lac Argentino pour se dédier à l’élevage de moutons. Il meurt jeune, atteint d’une tuberculose, laissant l’Estancia à la charge de sa femme et leurs trois filles. C’est aujourd’hui un des petits-fils des fondateurs, Adolfo, qui gère l’Estancia, son activité étant aujourd’hui principalement bovine et touristique.

Bien qu’ouverte aux touristes, l’Estancia est encore en fonctionnement (bergerie et exploitation bovine) et a conservé son style patagonique. On peut y passer une journée ou alors s’immerger dans son ambiance et son cadre naturel exceptionnel pendant quelques jours.

Tout est mis en œuvre pour que les visiteurs comme les hôtes soient confortablement installés (l’estancia dispose de 10 chambres) et puissent profiter du contact avec la nature tout en se reposant.

C’est ainsi que les Gauchos, les fameux gardiens de troupeaux argentins, nous font partager les grands moments de leur quotidien : les travaux de la ferme avec les moutons et les vaches, on pourra même assister à une démonstration de tonte de moutons.

Le plus impressionnant reste le cadre, entre lac et cordillère des Andes. Nous partons à cheval vers la cordillère avec l’un des gauchos de l’Estancia afin de s’immerger dans la nature.

L’expérience est magique pour notre petit groupe, le paysage dévoile son immensité et nous fait oublier rapidement le climat frais de la steppe patagonique.

L’estancia propose des randonnées à cheval sur la journée et également une randonnée de 5 jours dans les paysages reculés du parc national des Glaciers entre lacs, hautes montagnes et glaciers.

Nous reprenons la route et laissons derrière nous l’Estancia Nibepo Aike et El Calafate pour prendre la célèbre route 40 en direction du Nord jusqu’à Tres lagos, puis nous rentrons dans les sentiers de piste de la Patagonie en direction de la cordillère. Nous traversons la steppe pour ensuite longer le Lac San Martin. Nous sommes loin de tout, l’Estancia El Condor est isolée entre la cordillère et les eaux turquoises du lac. L’Estancia ne fait plus d’élevage sur ses 40.000 hectares et se concentre depuis déjà 10 ans à un projet de conservation de la faune et la flore autochtone de la Patagonie.

On s’installe avec plaisir au coin de la cheminée pour y écouter l’histoire de Jimmy Radboone, le premier habitant d’El Condor. Ce jeune anglais débarque à la fin du XIXème siècle à Punta Arenas en Patagonie chilienne. Il existe beaucoup de légendes autour d’« El Jimmy », le bandit de la Patagonie. Il s’installe finalement sur ces terres éloignées avec sa femme, nièce d’un Cacique indien. Le petit ranch de Jimmy est aujourd’hui en ruines sur les rives du Lac San Martin. On peut d’ailleurs rejoindre les ruines et le refuge « La Nana » qui offre une halte parfaite lors de randonnée à cheval de plusieurs jours.

Protégée du vent par de hauts peupliers, la maison principale de l’Estancia, date de 1912, son architecture est simple et typique de la Patagonie où dominent les tôles ondulées et le bois.

Le confort et l’hospitalité sont au rendez-vous, 6 chambres accueillent les hôtes et en cuisine, on nous prépare les meilleurs plats typiques de la Patagonie avec les légumes du jardin et la viande des estancias voisines.

A 23h30, le générateur électrique se coupe, tout le monde dort déjà, demain matin nous attend une randonnée à cheval de 6h vers la Laguna Corazon (lagune cœur).

Nous partons en direction de la Cordillère dans un paysage vierge, le sentier s’élève à travers des bois de lengas (arbres typiques de la Patagonie). Hors de la forêt, nous traversons des prairies dégagées qui nous offrent un point de vue sur les cimes enneigées.

Le retour vers l’Estancia est magique, nous découvrons une vue panoramique sur le lac San Martin tout en empruntant un chemin à flanc de colline.

Dernier jour à El Calafate, départ tôt le matin vers le port de Punta Bandera sur le Lac Argentino. La couleur de ses eaux est turquoise, il s’agit de farine de roche appelée lait glaciaire produite par le mouvement des glaciers sur les roches. Aujourd’hui le beau temps est au rendez-vous, je peux rester sur le pont du bateau alors que les premiers blocs de glace d’un bleu profond apparaissent.

Notre bateau circule dans un véritable champ d’icebergs qui se sont détachés du glacier Upsala vers lequel nous nous dirigeons. Nous prenons ensuite le Canal Cristina qui nous emmène vers l’Estancia.

En débarquant, l’isolement et la beauté du lieu m’impressionnent. Je me demande alors comment Joseph Percival Masters et sa femme, venus d’Angleterre, sont arrivés jusqu’ici pour finalement y fonder l’Estancia Cristina en 1914. L’histoire de la famille est documentée dans l’ancien Galpon où se faisait la tonte des moutons. Je découvre alors que les tondeurs de moutons étaient de vrais professionnels qui se déplaçaient en groupe d’une estancia à une autre. La tonte d’un mouton se fait en une seule pièce, un travail délicat.

Dès notre arrivée à l’Estancia, nous sommes séparés en petits groupes selon les excursions choisies. Pour ma part, je pars en 4×4 dans les hauteurs de l’Estancia vers le mirador du glacier Upsala. Apres 40 min, nous empruntons à pied un sentir sur une moraine avant d’arriver jusqu’au Mirador.

Le vent souffle fort ce qui rend encore plus impressionnant le spectacle du Glacier Upsala, véritable langue de glace qui se dévoile dans toute sa magnitude. Il rejoint au loin le champ de glace sud de Patagonie (Campo de Hielo Patagónico Sur). Il s’agit du plus grand champ de glace continental après l’Antarctique et le Groenland. Le silence s’impose.

L’Estancia Cristina n’est plus en activité et se consacre aujourd’hui principalement au tourisme. En plus de proposer plusieurs formules d’excursions à la journée pour connaitre le Glacier Upsala, elle accueille aussi des hôtes en pension complète avec 20 chambres réparties dans 5 cabanes au style patagon, respectant ainsi l’esprit du lieu et son histoire.

En fin d’après-midi, le bateau de l’Estancia Cristina nous ramène vers le port d’El Calafate. Assise sur le pont du bateau, au chaud dans ma doudoune, je laisse derrière moi la Cordillère des Andes enneigée, le lac Argentino et l’immensité des paysages de la Patagonie.

Consultez nos circuits en Patagonie argentine, notre séjour à l’estancia Nibepo Aike ainsi que notre croisière spéciale glaciers.

Pour les passionnés d’équitation, plusieurs randonnées à cheval en Argentine, traversées de la cordillère des Andes ou expéditions en Patagonie et en Terre de Feu sont proposées.

Contactez Désirée pour plus d’informations sur nos voyages en Patagonie.