La plus belle rivière du monde se trouve en Colombie

Partons aujourd’hui à la découverte d’un endroit unique au monde, situé en plein cœur de la Colombie, dans le Meta, l’une de ses 32 régions. Cet endroit est modestement surnommé « la plus belle rivière du monde » ou bien « la rivière qui s’est échappée du paradis ». Le titre parait exagéré mais il est difficilement contestable une fois sur les berges de ce majestueux cours d’eau. Bienvenue à Caño Cristales.

Nous serons tous d’accord pour dire que nombre de voyages ont commencé sur une carte. Sur une page internet ou celle d’un atlas, peu importe, les questions sont les mêmes : quels sont les sites d’intérêt de ce pays, de cette région ? Comment faire pour aller d’ici à là ? Quels obstacles devrons-nous franchir ? Je vous invite donc à commencer cette lecture en ayant une carte de Colombie sous les yeux, et de placer votre doigt sur ce qui serait pour vous le point central du pays.

Caño Cristales se mérite!

Se rendre à Caño Cristales

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Si tout va bien (et attention, ce qui suit n’est pas valable sur une carte politique), vous pointez une zone naturelle à la végétation dense, à l’Est de la cordillère orientale, et au sud de Bogotá, apparemment assez proche de la capitale. En apparence seulement, car avoir la chance de connaitre cette merveille naturelle se mérite. Arriver au village de la Macarena, point d’entrée de Caño Cristales, ne se fait que par voie aérienne tant les routes environnantes sont hors d’usage. L’avion peut arriver soit de Bogotá (3 à 4 vols par semaine avec la compagnie Satena) soit de Villavicencio, ville se trouvant à deux heures de route au Sud de Bogotá.

Caño cristales se trouve à une heure de vol de Bogotá ou de Villavicencio. Depuis Bogotá, vous voyagerez avec la compagnie Satena dans un ATR, un avion à hélices de 42 ou 72 places. Pour plus d’aventure, il faut prendre un vol depuis Villavicencio. Selon les jours, vous emprunterez soit une petite avionnette de 11 places maximum soit un mythique D-C3, cet avion bimoteur à hélices utilisé par les Alliés pendant la seconde guerre mondiale.

Ce n’est quand même pas courant de voyager dans un tel avion, c’était en tout cas une première. J’y monte par ses petites marches avec l’aide aimable du pilote et je m’assoie sur un coté du couloir, dos à la carlingue. Nous sommes les uns à côté des autres avec devant nous l’ensemble des bagages et des cargaisons venant approvisionner les habitants de la zone.

Après une bonne dose de sensation, nous voilà arriver à destination. A quelques minutes de l’atterrissage, en phase de descente, on distingue une immense plaine. A l’horizon, on devine une végétation luxuriante entrecoupée des lacets tracés par les énormes cours d’eau les traversant… mais impossible d’apercevoir encore Caño Cristales.

On distingue un point au milieu de la plaine, la Macarena, et soudain la piste sur laquelle nous nous apprêtons à atterrir…. Soupçon d’angoisse… une simple ligne de gazon puis de terre longeant les rues en damier de ce petit village.

Mes mains s’humidifient en voyant la piste, mais en regardant à droite à gauche, je suis visiblement le seul à bord à être stressé. Quelques secousses, quelques respirations profondes, nous touchons enfin le sol sans accroc. Me voilà rassuré et c’est chaleureusement que je sers la main au pilote peu avant de quitter le beau fuselage gris platine de cet avion d’un autre temps.

La première chose marquante à l’arrivée à la Macarena est la bonne organisation de l’activité touristique. Nous sommes directement pris en charge par le guide qui nous accompagnera pendant les prochains jours. On sent à quel point un village entier est tourné vers le tourisme et s’est reconverti après avoir été noyé sous une vague de violence et d’insécurité.

En effet, La Macarena a pendant une décennie été une zone contrôlée par la guérilla. Cela a bouleversé totalement la vie des habitants, profondément ancrés dans la culture llanera, comparable à celle des gauchos en Argentine, en Uruguay et dans le sud du Brésil, à celle des huasos au Chili, des Charros au Mexique ou des cowboys aux Etats-Unis, avec un folklore extrêmement riche dont les danses, les musiques et les poèmes représentent une réelle fierté locale.

La Macarena, Village Colombien paisible et accueillant, point de départ pour Caño Cristales

Assez rapidement nous saute aux yeux une présence militaire qu’on pourrait considérer comme inquiétante. Au final, on s’y habitue vite et à aucun moment nous nous sentirons en insécurité. Le village est paisible, les gens sont aimables et souriants comme c’est presque toujours le cas en Colombie, les enfants jouent dans les cours d’école. Bref…la vie semble avoir repris son cours.

Nous nous installons dans notre hôtel, un des meilleurs établissements du village au confort certes sommaire, mais parfaitement propre et accueillant. A peine le temps de déposer nos affaires, nous partons en véhicule afin de d’aller voir le coucher de soleil (toujours impressionnant dans les plaines des llanos).

Sur le chemin, un magnifique Ara nous offre une séance photo, comme un prélude à la mosaïque de couleurs que nous verrons le lendemain à Caño Cristales.

Le soir venu, direction une cantina à deux pas de l’hôtel. Au menu, du grand classique en Colombie : poulet, bœuf ou poisson accompagné de riz, de salade, d’avocat et de patacones, une lamelle de banane plantain frite. Le tout accompagné de l’incontournable jus de fruit 100% naturel. Rien d’extrêmement élaboré mais une cuisine simple et savoureuse faite de produits locaux.

Le lendemain matin, après un petit déjeuner frugal, nous retrouvons les militaires en charge de contrôler le nombre d’entrées sur le site. Celles-ci ne doivent pas excéder 170 par jour afin d’en préserver sa biodiversité. Une fois que tout est en ordre, nous montons donc sur notre bateau parqué juste à côté d’une navette d’assaut de la marine colombienne. Étonnant, même si on commence à s’y faire. Je me rappelle avoir pensé que je ne verrai jamais plus un plan Vigipirate avec la même gravité !

Au cours des 25 minutes de navigation nous aurons eu la chance de pouvoir observer au plus près singes, tortues et plus furtivement des dauphins roses.

Un véhicule nous attend pour nous conduire sur une piste pas évidente jusqu’à la limite du parc. Nous devons alors sortir du véhicule et continuer à pied jusqu’à la rivière. Ces 30 minutes de marche sont certainement le moment le moins agréable du séjour. Aucune difficulté technique mais un paysage monotone, à la végétation basse et l’absence d’ombre font que l’on a hâte d’entendre enfin le bruit de l’eau descendant la rivière.

Une fois arrivés à Caño Cristales, impossible de ne pas s’émerveiller devant la beauté vierge et brute du paysage. Impossible non plus de ne pas se rendre compte de la chance que nous avons de pouvoir profiter d’un spectacle naturel si fabuleux rendu possible par la présence d’une plante aquatique endémique, la Macarenia Clavigera. Selon son emplacement et son exposition au soleil, elle tapissera le lit de cette rivière de teintes vertes, rouges ou rosées, couplées de couleurs plus ocres, jaunes, ou bien tendant vers le noir donné par le sable et certaines roches. Voici toutes les tonalités, que vous pourrez observer au fil de l’eau.

Mais ce n’est pas la seule surprise. En effet, outre ces couleurs sorties tout droit d’une aquarelle de Cézanne, les formations géologiques millénaires donnent encore une dimension et un attrait supplémentaire au site. Entre vasques, remous, cascades, piscines naturelles et tunnels, l’eau se fraye toujours un passage, même si le chemin est tortueux. Et par endroit, c’est un peu comme si un architecte de la trempe d’un Niemayer ou d’un Le Corbusier avait tenté de construire un SPA en milieu tropical.

Caño Cristales: site naturel au partimoine de l'UNESCO

Un SPA… Ce n’est bien évidemment qu’une image, même si à de multiples reprises vous pourrez vous baigner dans ces eaux à la pureté exceptionnelle. Par contre, la baignade sera strictement interdite là où il y a des plantes aquatiques, car même le sel de la peau peut affecter l’équilibre de cette flore en partie endémique. Il vous sera également formellement interdit de vous baigner si vous vous êtes appliqué de la crème solaire (par ailleurs fortement conseillée) pour éviter toute pollution aquatique.

Je ne vais pas lister les particularités de tous les sites auxquels nous avons accédés, afin de laisser intacte la surprise de tous ceux qui auront la chance d’y aller. J’insiste sur le mot chance car Caño Cristales est un endroit hors du commun, ce n’est pas un hasard s’il est inscrit au patrimoine naturel de l’Unesco.

A la jonction de la cordillère orientale, des plaines des llanos, et de la forêt amazonienne, cette zone est l’une des plus riches au monde en termes de faune et de flore avec pas moins de 420 espèces d’oiseaux, 10 d’amphibiens, 43 de reptiles et 9 de primates. Des chiffres impressionnants certes, mais pas forcément hors normes en Colombie. Le véritable trésor de Caño Cristales, c’est bien la Macarenia Clavigera. Sans cette plante endémique, il n’y aurait pas de rivière colorée et nous n’aurions certainement pas connaissance de ce petit du bras du fleuve Guayabero.

Le cycle de cette plante est également exceptionnel car il dépend totalement de celui de l’eau. En effet, le lit de la rivière n’est submergé que pendant une saison humique allant de juin à novembre. Le reste de l’année Caño cristales et la Macarenia Clavigera s’assèchent également pour reprendre des couleurs avec l’arrivée de l’eau. Cela conditionne, vous l’aurez compris, la saison touristique.

En guise de conclusion, et si c’est encore nécessaire, je souhaite mettre l’accent sur le caractère exceptionnel du site de Caño Cristales, tant par sa faune, sa flore que son histoire récente. Il me parait aussi important de souligner la bonne gestion des autorités locales et nationales. En protégeant de manière drastique ce parc, elles ont offert des perspectives de développement durable qui mettent en valeur leur culture et leurs qualités naturelles d’accueil et de partage.

Pour ce qui est de la présence militaire, il faut laisser le temps au temps, ce déploiement militaire n’a absolument pas vocation à perdurer, et les jeunes soldats qui commencent leur carrière n’ont pas, comme l’atteste cette photo, conscience de ce qui s’est passé là-haut dans les années 2000. Ils montrent une détente et une insouciance tendant à prouver que le danger est déjà loin !

En espérant que cette lecture vous aura été agréable et qu’elle aura générer une envie irrépressible de venir découvrir Caño Cristales, je vous invite à parcourir le site web de notre agence Terra Colombia et en particulier le circuit dédié à cette rivière aux mille couleurs.

Pour plus de détail, consultez la page spécialisée sur Caño Cristales (en espagnol).