Sandrine Gallo

 

Récit, photos, devinettes & énigmes de Sandrine Gallo, fondatrice et gérante de Terra Lusitania, ex-gérante de Terra andina Peru.

Voici cinq mois que la dernière des agences Terra a vu le jour au Portugal, deux mois de reco en camping-car, une installation express à Lisbonne, trois mois de bureau pour préparer les programmes et assurer la logistique, il est temps pour moi de reprendre la route, l’appel de la découverte me fourmille les pieds surtout que je m’étais laissée « le plus près » pour « plus tard » et puis, prise dans la tourmente, je ne connaissais finalement pas très bien la région qui m’accueillait.

Bon, assez parlé, prêts à me suivre ? Où cela me direz-vous ? Et bien, je ne vais pas vous le dire, à vous de deviner !

8 étapes, 8 énigmes, nous gardons tous en nous enfouie une âme d’enfant alors je pense que ce petit jeu vous divertira autant que moi. Quelques indices « pratiques : prenez avec vous une bonne paire de baskets, un alcotest, un maillot de bain, des jumelles et votre bonne humeur ! Je crois en avoir déjà trop dit !

Départ en voiture en direction du Sud par le célèbre pont rouge suspendu qui enjambe le Tage, le Pont du 25 Avril (en référence à la révolution des œillets de 1974), en seulement 30 minutes, j’arrive à ma première étape.

Etape 1 : la devinette

Vous trouverez ici plusieurs types d’empreintes : humaines, elles se comptent par centaines et convergent vers une curieuse église adossée à une falaise. Les autres, beaucoup plus anciennes laissées par des animaux qui vivaient autrefois, oh pas si longtemps que ça, quelques 200 millions d’années ! … Quel est ce lieu ?

Après le bain de foule du centre de Lisbonne, Belem ou Sintra qui ne désengorgent pas une minute même en hiver, je me sens ici vraiment toute seule, je suis d’ailleurs presque toute seule à part 4 pèlerins qui sortent d’un 4×4, pèlerins, je ne croyais pas si bien dire car je suis ici sur une des étapes du chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Un refrain me vient à l’esprit « Il est un estuaire à nos fleuves de soupirs où l’eau mêle nos mystères, et nos belles différences», c’est exactement ça l’autre Finistère version portugaise of course : un lieu atypique, un phare, des falaises aux couleurs ocres, une église baroque, une chapelle du XVIème siècle qui pour le coup fait plus penser à la Grèce qu’a la Bretagne, une légende, toujours des légendes : celle qui a vu sortir de l’Atlantique la Vierge à dos d’âne, gravir la montagne sous l’œil ahuri de deux vieillards, preuve oblige les empreintes laissés par l’animal sur le versant de la montagnette. Quelques siècles plus tard, on se rend compte que les pas de la bourrique sont en fait ceux laissés par des dinos de l’époque jurassique « légèrement » avant 1400 apJC ! Un chemin de randonnée permet en une vingtaine de minutes de se rapprocher des empreintes où un pique-nique ensoleillé s’impose. Croquer dans son sandwich le derrière calé dans les griffes d’un sauropode ou peut-être même d’un théropode c’est quand même la classe, não é ?

Etape 2 : le rébus

Petite ville tranquille en semaine, réputée pour son plaisant bord de mer, son château et ses petits bateaux de pêche colorés, l’étape 2 est celle du café terrasse post digestion. Au Portugal, le café est une institution, à n’importe quelle heure de la journée, l’expresso est dans tous les esprits et se boit sans modération, on prend une bière, OK mais toujours accompagnée d’un café ! C’est un moment de convivialité, les terrasses ne sont jamais vides, même en pleine nuit on est encore sur la terrasse une tasse à la main, les cafés mettent d’ailleurs à disposition des couvertures pour les jambes des clients.

Etape 3 : le mot mystère

La claque : je quitte l’océan pour me retrouver en … Méditerranée ! Le bord de mer de ce parc naturel est tout simplement incroyable, un Cassis version lisboète, l’ambiance des petits villages marseillais dans les calanques, des sentiers pour se promener, une eau azuréenne, des senteurs enivrantes, une végétation tellement verte je dirai même fluorescente, des restos sympas de poissons. Je regrette presque mon repas de l’ère secondaire, bon les recos ça sert à ça, ce sont les suivants qui en profiteront !

Etape 4 : la charade

Mon premier est la 3ème lettre de l’alphabet,
mon second est le contraire de rien,
mon troisième est une fête populaire dansante
mon tout est le 3ème port de pêche du Portugal

Comme toutes les villes avec des ports de pêche, une appréhension : sale ? inculte ? Mes aprioris sont vite laissés de côté avec la découverte du centre-ville piétonnier et d’un joyau : l’Igreja de Jesus, réalisée par le même architecte que le monastère des Jeronimos de Belém. Un intérieur époustouflant avec des colonnes torsadées ressemblant à des lianes soutenant la voute principale. Autre surprise de la journée, c’est depuis ce port que sont organisées des sorties en mer pour observer les dauphins dont une colonie habite les eaux de l’estuaire et sont visibles toute l’année. Je n’aurai malheureusement pas le temps aujourd’hui de monter à bord du catamaran. Voilà encore un beau cadeau pour mes successeurs.

Etape 5 : le code alphanumérique

l’Estuaire du « 19.1.4.15 »

L’estuaire renferme de belles surprises, des cétacés mais pas uniquement, c’est également un sanctuaire ornithologique, flamants roses, cigognes, cormorans, au total une vingtaine d’oiseaux rares y élisent domicile tout au long de l’année. Il me faudra sûrement plusieurs mois pour connaître parfaitement l’immense réserve naturelle.

Je décide aujourd’hui de visiter la zone de Mourisca dont l’ancien moulin à marée utilisé jusque dans les années 50 a été récemment rénové et transformé en centre d’interprétation spécialisé dans l’observation des oiseaux. Des plateformes et des pontons en bois ont été aménagés. J’arrive en fin de matinée à marée basse, la mer s’est retirée à 7h ce matin, marécages à perte de vue, chênes-lièges, cabanes en roseaux des pêcheurs, quelques petits canards pataugent dans les eaux boueuses, les bateaux attendent patiemment la remontée des eaux prévue pour 15h. Une communion parfaite avec la nature où le silence est roi.

J’ai encore un peu de temps, je décide donc de remonter en voiture et continuer un peu plus loin. Ma carte indique « Gambia », un lieudit avec une vigie pour l’observation des oiseaux. C’est tout proche, à une dizaine de kilomètres. Ici, un peu plus d’animation, deux pêcheurs préparent leurs sorties en mer, j’en profite pour leur poser quelques questions d’usages, je me doute qu’ils connaissent l’estuaire comme leur poche. Ils me conseillent d’aller tout simplement visiter les alentours, avec un brin de patiente et de chance (quand même), il y a toujours de bonnes surprises ici ou là. Après seulement quelques minutes de marche, je suis attirée par des cris d’animaux, de loin une bande blanche, je pense à des canards mais non, aujourd’hui est un jour de « sorte », c’est une colonie de flamants roses, une trentaine, qui batifolent dans les eaux saumâtres de l’estuaire. J’ai passé la journée à mitrailler le paysage et la batterie de mon appareil photo est sur le rouge, je garde donc les ultimes soupirs pour l’envol qui ne se fait pas attendre. La mère Terre a été généreuse avec moi aujourd’hui et il faut savoir ne pas en abuser, ne pas trop en vouloir, recevoir ce qu’elle a décidé de donner et ne pas prendre sans demander. Mes 10 années dans les Andes ont définitivement laissé des traces…

Etape 6 : le code pavillons

Jeu de piste au Portugal - devinette n°6 : saurez-vous déchiffrez ce code en pavillons ?

Ici, rien ne manque, un château médiéval édifié sur un piton rocheux construit sur les vestiges d’une ancienne citadelle maure, vue panoramique permettant d’apprécier les alentours sur plusieurs kilomètres, l’estuaire du Tage, la sierra da Arrabida, les moulins à vent qui se succèdent en « rang d’oignons » sur la colline opposée, les ruelles sinueuses aux belles façades blanchies à la chaux puis les magasins de décos, « reco décos » hum pas vraiment une bonne idée pour le portefeuille même si les prix sont relativement accessibles. Fer forgé, cires, couleurs chatoyantes, meubles en bois vieilli, des cavernes d’Alibaba pour les amoureux de style campagnard, et puis bien sûr les vignobles qui nous amènent à l’étape 7.

Etape 7 : le mot à l’envers

«  letacsom »

Le Nord à son porto, les îles leur madère et le Sud son muscat ! :  la route des vins de la péninsule de Sétubal est une coopérative d’une vingtaine de caves viticoles, impossible de toutes les visiter, j’en sélectionne deux. Tout d’abord Jose Maria da Fonseca, une référence en la matière. Fière de sa lignée de 6 générations de vignerons, la maison fabrique du vin depuis 1834 et exporte dans plus de 70 pays. Ils sont propriétaires de nombreux domaines, désormais la Quinta familiale ne produit plus de vin et s’est transformée en musée. Visite plaisante pour tout savoir sur la fabrication du vin au XIXème siècle, personnel amical, l’odeur du vin est omniprésent, les fûts en sont toujours imprégnés. A la fin de la visite comme à l’accoutumée, la cérémonie de dégustation des spiritueux. Une bonne adresse.

Pas très loin, une autre cave, impossible de la louper, la Quinta de Bacalhôa. En bordure de route, un rond-point à l’effigie de la maison, des oliviers centenaires abritant une rangée de soldats de terre cuite de l’empereur QIN peints couleur bleu canard , « oupa » le ton est donné ! Je rejoins une visite commentée en cours qui va m’aider à mieux comprendre ce qui se trame ici. On ne parle pas de lignée de vignerons mais de lignées d’investisseurs, une grosse fortune – dont j’ai préféré oublier le nom – a investi dans les vignobles et dans l’art puis a décidé de tout réunir sous un même toit. Du coup, plusieurs options de visites dont la présente qui commence par 30 mn d’art africain. Moi qui revient d’Afrique du sud, je ne me sens pas du tout dépaysée, puis vient l’art nouveau, l’art déco, bref j’en oublie l’objet de ma présence ici. Monsieur X à qui il restait encore un peu d’argent s’est également offert le palais de Bacalhôa, à 3 kilomètres, RDV à étape 8.

Etape 8 : l’anagramme

« aiazote »

L’ex libris de la région, un palais royal du XVème siècle. Le guide s’est gentiment proposé de m’y emmener car c’est bien depuis la Quinta que se gèrent les visites privées du Palais de Bacalhôa. Une très belle demeure ancienne qui a été remodelée sur plusieurs siècles, jardins à la française côtoyant les vignobles, belles séries d’azulejos du XV et XVIème siècle, superbe. Le petit village est également réputé pour ses fabriques artisanales d’azulejos, l’une d’entre elles jouxte la porte du palais. Senhor Luis, qui a l’habitude des touristes curieux comme moi, me fait visiter son atelier. L’azulejo est un emblème du Portugal, le célèbre petit carreau en céramique peint à la main depuis des siècles continue d’exister de façon plus moderne, les commandes personnalisées affluent tous les jours et pas seulement du Portugal aussi des USA, du Japon et j’en passe. Ici, il est possible d’organiser un workshop pour élaborer son propre azulejo. A bon entendeur !

Un jeu de piste même le plus simple soit-il n’en serait pas vraiment un sans une récompense finale. Alors, vous avez réussi à découvrir les 8 étapes ou pas ? Dans l’ordre :

1. Cabo Espichel
2. Sesimbra
3. Parc naturel d’Arrabida
4. Setubal
5. L’estuaire du Sado
6. Palmela
7. Les vignobles de Moscatel
8. Azeitão

Vous connaissez la valeur du trésor, convoité par les plus grands pirates des temps modernes, à seulement cinquante kilomètres de Lisbonne, Arrabida et l’estuaire du Tage représentent une véritable aventure humaine, un dépaysement assuré, je suis moi-même surprise par la richesse naturelle, culturelle et ethnologique de ce petit pays, le Portugal, qui a tant à offrir et reste si humble. Autant vous dire que le retour derrière l’ordi va être dur, j’en ai pris plein les mirettes et j’en redemande car le Portugal n’a pas fini de me/nous surprendre. Suite au prochain épisode !

Retrouvez le circuit élaboré par Sandrine à l’issue de ce voyage de réconnaissance terrain : Arrabida et Estuaire du Sado

Contactez Sandrine pour plus d’informations sur ce séjour au Portugal.