Voyage à la découverte des indiens Bribri au sud du Costa Rica

Ma chère collègue Daniela et moi même, Jules, sommes les deux chanceux de l’équipe à participer à ce voyage de reconnaissance que nous décrirons bien volontiers et en un mot d’insolite.

Le but de ce voyage est d’aller à la rencontre des indiens Bribri (peuple qui compte environ 15 000 personnes, pas plus) dispersés (principalement) dans la partie Sud de la Cordillère Talamanca, au Sud du Costa Rica, à la frontière avec le Panama.

Départ de San José à 08:00 en direction des Caraïbes et du village de Puerto Viejo de Talamanca.

Après 4 heures de route nous arrivons à l’intersection permettant de descendre encore plus au Sud, en direction du territoire Bribri, dans la Cordillère de Talamanca.

Nous arrivons au village de Bribri où nous avons rendez-vous avec notre guide local, Junior. Junior a 33 ans. Il est Bribri et fier de l’être. Sa principale activité est guide de trek. Il connait la Cordillère comme sa poche et bien sur toutes les communautés qu’elle abrite.

Immersion en terres Bribri

Après un bon “casado” (plat typique à base de riz, bananes plantain, salade et viande) dans une “soda” (restaurant) du coin, nous reprenons la route, abandonnons derrière nous l’asphalte pour de petites pistes en terre. Après 30 minutes de route, trois fleuves et 2 champs de bananes, nous arrivons au lieu dit de Bratsi où nous laissons le véhicule pour les 4 jours suivants. L’immersion commence ici.

14h30, entassés sous un abri pour nous protéger du soleil (38°C pour environ 90% d’humidité), nous attendons le bus local qui nous emmènera jusqu’à “l’embarcadère” de Suretka où nous traverserons le fleuve en pirogue. La pirogue n’est pas là. Je profite de l’occasion pour sortir l’appareil et prendre quelques photos de l’environnement local.

Nous y sommes presque. Après 20 minutes supplémentaires de bus, nous parvenons à notre point de chute du jour, la communauté d’Amubri. Nous traversons le village à pied. Les gens nous regardent, nous saluent, nous sourient. Notre présence à l’air de les amuser.

Une halte à Koswak dans une auberge Bribri

Nous arrivons enfin à la petite auberge Koswak, gérée par notre collaborateur Roger, qui nous accueille très amicalement. C’est étrange, nous ne nous connaissons que par téléphone et pour autant nous nous sentons tout de suite très à l’aise. Roger a 38 ans, il est Bribri. Il a de petits yeux rieurs, un grand sourire et une voix très douce.

C’est avec beaucoup d’entrain qu’il nous fait visiter l’auberge. C’est un ensemble de plusieurs cabanes en bois, montées sur pilotis, avec de grands toits en chaume coniques. Le confort y est sommaire, mais c’est très propre. Deux des cabanes sont des dortoirs. Nous dormons dans celui qui est compartimenté en petites chambres. Chaque chambre compte un matelas confortable et une moustiquaire, rien de plus, rien de moins.

Une autre cabane, la plus grande, est celle où on se réunit, où on discute, où on partage. Elle est équipée de plusieurs hamacs, d’une table et de divers ornements Bribri.

La dernière cabane, plus haute perchée, est la cuisine et le réfectoire. Ici à Koswak, tout est préparé au feu de bois, le four électrique ou le micro onde n’existent pas. Junior et Roger nous invitent à boire une coupe de chocolat chaud (chocolat préparé par la communauté, mélangé avec de l’eau, pas de lait) puis une coupe de Chicha (alcool de maïs fermenté).

Nous bénéficions d’un temps de repos avec Daniela, notamment pour prendre une douche et nous allonger quelques minutes avant de participer à notre cours de langue… Bribri. Voici quelques mots:

Mia mia: Merci

Ekeke: A bientôt

Alakol: Femme

Wem: Homme

Awa: Médecin

Kal: Arbre

Namu: Tigre

Tö: Oui

Aù: Non

Après un délicieux repas, agrémenté des meilleurs “patacones” (galettes à base de morceaux de banane plantain verts aplatis et frits) jamais encore goûtés au Costa Rica nous allons nous coucher. Il est 21h00. Les 2 jours de marche à venir s’annoncent musclés, il convient de se reposer comme il se doit.

Trek en pleine jungle costa-ricienne vers la communauté de Bris

Jour 2 :

réveil à 5h30 le matin avec le chant des oiseaux. Après un petit déjeuner copieux à base de “tamales” (papillote de pâte de maïs, cuit avec de la graisse de porc, agrémentée d’épices, de légumes, de viande et de riz), rien que ça, nous révisons sur la carte le petit périple qui nous attend.

Le premier jour suppose entre 6 et 8 heures de marche sur des sentiers naturels, principalement dans une forêt tropicale secondaire semi sèche. L’objectif de cette journée est la communauté de Bris où nous passerons la nuit chez une famille de la communauté.

La seconde journée, bien que plus courte (environ 4 à 5 heures de marche) sera plus intense. Les conditions y sont plus extrêmes puisque nous évoluerons dans une forêt primaire, beaucoup plus dense et beaucoup plus humide et accidentée. Le point d’arrivée de cette seconde journée est la communauté de Yorkin. Mais nous n’en sommes pas encore là, revenons donc à nos moutons.

L’itinéraire en tête, nous remplissons nos gourdes, mettons nos déjeuners dans nos sacs, révisons une dernière fois que nous ne laissons rien derrière nous et partons.

Une première heure de marche nous permet d’atteindre assez facilement la première communauté, du nom de Katsi. Katsi est un village, tout petit, avec quelques cabanes, une école et une église. Je remarque deux enfants nous espionnant depuis le pas de leur porte, se cachant chaque fois que nous les regardons. J’entame avec eux le jeu du 1, 2, 3 soleil pour les prendre en photo. Chaque fois qu’ils se cachent j’avance d’un pas ou deux. Ça à l’air de beaucoup les amuser, et moi aussi en réalité.

Passé Katsi et son “célèbre” pont suspendu, notre trek à proprement parlé commence, de l’autre côté de la rivière, nous rentrons dans la forêt. Il fait très chaud et très humide. Nous suons beaucoup et prenons le temps de faire des pauses régulières pour nous hydrater.

Une des pauses se fait depuis un mirador où nous dominons une petite partie de la Cordillère Talamanca.

Après plusieurs heures de marche, nous croisons des indiens. Junior nous confirme que nous arrivons à la seconde communauté, celle de Namuwoki.

A l’instar de Katsi, nous découvrons un village très simple avec quelques petites cahutes, une école et une cabane conique dont le toit descend jusqu’au sol. Cette cabane n’est pas une maison mais un sanctuaire où les cérémonies de la communauté ont lieu. Nous croisons des enfants. Ils sont manifestement très interloqués par notre présence et ont l’air effrayé par l’appareil photo. Encore une fois on ne ressent aucune crainte chez eux, simplement la surprise et la curiosité.

Nous avons déjà marché 4 heures. Junior propose de nous arrêter pour déjeuner à la rivière juste après la communauté. Ce n’est pas de refus, nous mourrons de faim et l’idée d’une petite baignade dans une rivière fraîche nous convient à ravir. Plusieurs enfants de la communauté nous font le plaisir de leur présence pendant le déjeuner et jouent dans la rivière. Ils sont beaux. Ils ont l’air heureux. Ils vivent simplement et s’amusent de rien. Je les observe et les prends en photo. Ils ne font pas attention à moi (ce qui rend les photos encore plus naturelles). C’est un moment anodin et pourtant intense qui m’invite à la réflexion (j’avais vu à San José la veille deux enfants du même âge se disputant la tablette de leur mère pour pouvoir jouer à un jeu vidéo…).

Après deux heures de marche supplémentaires nous parvenons à la communauté de Bris et sommes accueillis par Gilberto et sa famille. L’odeur de feu de bois, les fruits de cacao étalés dans la pièce à vivre, les poulets et cochons dans le jardin… Leur cabane est simple, il n’y a pas presque pas de meuble. Il n’y a pas d’électricité non plus, ni de salle bain. Ici la toilette se fait directement dans le petit ruisseau derrière la cabane et c’est un vrai bonheur après nos 7 premières heures d’expédition.

Après un diner typique (haricots rouge, riz et poulet), un ancien de la communauté vient nous rencontrer pour nous conter les débuts de la communauté et nous en dire un peu plus sur les coutumes et traditions du peuple Bribri. La veillée se fait à la lueur des bougies et à la “chaleur” de quelques tasses de chicha. Nous apprenons beaucoup de chose sur ce peuple aussi intéressant qu’attachant, depuis leur croyance en la nature et l’importance qu’elle tient dans leurs coutumes, leur méthode de chasse et leur médecine des plantes. L’échange est riche. Luis et Gilberto me questionnent aussi beaucoup sur la France, sur l’avion et le temps de trajet. Ça leur semble être le bout du monde (ce qui n’est pas complètement faux). Pour donner une idée, Gilberto et Luis, lorsqu’ils quittent la communauté c’est pour aller au plus loin à Puerto Viejo. San José leur semble déjà être un autre pays. Alors la France…

Après cette veillée particulièrement enrichissante, nous nous installons dans nos tentes (à l’intérieur de la maison) et nous nous endormons épuisés.

Randonnée à travers une forêt primaire

Jour 3:

Réveil aussi matinal que la veille et petit déjeuner tout aussi copieux. Il est important de prendre des forces car cette seconde journée de marche, aussi courte soit-elle, ne sera pas de tout repos.

Il a plu pendant la nuit et après avoir dit au revoir et remercié Gilberto et sa famille, c’est les pieds dans la boue que nous démarrons notre marche. Après avoir croisé plusieurs maisons faisant aussi partie de la communauté de Bris, nous arrivons à la rivière. L’idée de la rando est de suivre la rivière jusqu’à Yorkin. Et de fait, nous ne ferons pas seulement la suivre, nous la traverserons plusieurs fois, 22 au total! C’est une journée de randonnée aquatique. L’idée de marcher plusieurs heures les pieds trempés ne nous enchante pas de prime abord mais au final, avoir les pieds dans l’eau réduit considérablement la température du corps, et en vue de la chaleur et du taux d’humidité, cette aventure s’en trouve fort agréable.

Pendant 4 heures nous marchons dans une forêt dense. L’impression d’être seul au monde est délicieuse. Même si cette sensation de se trouver au milieu de la jungle sans moyen de communication peut être angoissante, la présence de Junior, son sens de l’orientation et ses précautions sont très rassurants.

Nous faisons régulièrement des arrêts pour boire. C’est toujours l’occasion pour Junior de nous montrer certaines plantes et de nous expliquer leur utilisation, qu’elle soit médicale ou pour les constructions des cabanes. Nous cueillons des citrons en chemin et du cacao dont nous suçons les fèves, le goût est remarquable.

Nous arrivons finalement à destination, à la communauté de Yorkin où Doña Otilia nous accueille avec un grand verre d’eau et une mangue bien juteuse. Nous sommes contents d’être arrivés. Ces deux jours de marche n’ont rien de très technique, ni de très difficile en soi, mais les conditions de chaleur et d’humidité les rendent néanmoins très éprouvants.

La fin de l’après midi est dédiée à la visite du jardin de Don Guillermo, le mari de Doña Otilia, bien garni de plantes médicinales, et le plus important, à la confection de chocolat, depuis la cueillette des fruits du cacao dans le jardin, à la dégustation. C’est un processus de plusieurs jours en comptant le séchage et la macération des grains. Mais le résultat est bluffant et le chocolat qui en résulte est délicieux, même si très amer. Je ne rentre pas dans les détail, il faut que vous veniez pour le découvrir par vous-même.

Fin de notre immersion en terres Bribri et retour à la civilisation

La nuit tombée, nous dînons avec la famille et veillons à la lueur de… l’ampoule! Dans la communauté de Yorkin, il y a l’électricité, des salles de bains… et de vrais lits. C’est très apprécié!

Le lendemain matin nous prenons le temps de petit déjeuner, échangeons quelques mots avec nos hôtes et descendons à la rivière pour prendre la pirogue et retourner jusqu’à Bratsi où nous avons laissé notre véhicule. Le retour à la civilisation est intrigant.

Ces quatre belles journée nous auront invités à repenser certaines choses de notre quotidien et notre façon de relativiser notre appréhension de la vie en générale. Un peu de simplicité s’impose. Merci aux indiens Bribri. Mission accomplie!

 

Partez chez les Bribri au Costa Rica!

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